À Calenzana, un débat sur l’altération de l’offre de soins en monde rural
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Sous l’égide de l’Agence Régionale de Santé, de l’Association des Maires de la Haute-Corse et de la municipalité de Calenzana, un débat a été organisé le 17 novembre dernier afin d’évoquer la problématique des déserts médicaux. Cette première conférence départementale s’est inscrite dans le cadre du Conseil National de la Refondation mis en œuvre par le Président de la République. D’autres conférences suivront à Aléria, Corte, Folelli et Bastia dans les prochains jours afin de recueillir les attentes et les besoins des élus locaux, des professionnels de santé et de la population de chacun des territoires.
Qui doit-on appeler lors d’une situation difficile, quand un enfant est malade et a de la fièvre, quand une personne âgée fait un malaise et qu’elle se trouve éloignée d’un centre de soins ? Quelle place demain pour la médecine de ville ? Quid de la médecine de campagne ?
À Calenzana, il a été justement d’apporter des réponses à travers un débat engagé et serein entre les représentants de l’Etat comme le sous-préfet de Calvi, Yoann Toubhans ou encore la directrice départementale de l’ARS, Anne-Marie L’Hostis avec les professionnels de santé comme le docteur Dominique Simeoni, présidente du Comité Professionnel Territorial de Santé de Balagne et le docteur François Agostini, fondateur de la première Maison de Santé en Corse ou encore les élus locaux, le maire de la commune, Pierre Guidoni, le président de l’association des maires de la Haute-Corse, Ange-Pierre Vivoni, le maire d’Olmi-Cappella, Frédéric Mariani, le maire de Montegrosso, Jean-Marc Borri, le maire de Pietralba, Joseph Sauli ou encore le maire de Santa Reparata di Balagna, Marcel Torracinta.
Dans son mot de bienvenue, Pierre Guidoni, soulignait la nécessité de renforcer la présence médicale en milieu rural : « Nous sommes fiers à Calenzana de pouvoir débattre d’un sujet aussi sensible que celui de la santé, notamment en milieu rural. Certes, la commune est dotée d’une Maison de Santé mais il y a quand même un manque de docteurs dans notre bassin de vie. Cette situation ne peut continuer ainsi. On est souvent obligés d’aller vers le centre hospitalier de Calvi. »
Pour Yoann Toubhans, le sous-préfet de Calvi : « Il faut aussi appréhender les questions ultra médicales. L’exemple du partenariat avec le secteur public qui peut installer des médecins est pertinent. Quelles sont les attentes en termes de moyens de fonctionnement mis à disposition et pas forcément en termes de matériels ? »
Quatre ateliers ont ensuite été proposés concernant les thématiques des soins programmés, de l’accès au médecin traitant, de la prévention et de la démographie médicale comme l’a expliqué Anne-Marie L’Hostis : « Cette rencontre a pour but de récolter des propositions qui émanent d’acteurs locaux et de la population pour améliorer l’accès aux soins. Ce rassemblement se déroule en quatre temps : celui de l’accueil pour expliquer ce qui va se passer, celui de la visualisation des données du Pays de Balagne, suivie d’une intervention du Dr Dominique Simeoni, présidente du CPTS de Balagne. Lors des quatre ateliers nous avons demandé aux participants d’énumérer les problèmes rencontrés et de proposer des solutions les plus pragmatiques et concrètes. Tout cela va donner lieu à une réunion régionale en janvier 2023 avant de faire remonter sur Paris, où là, il va y avoir un travail d’analyse et un arbitrage, avant des décisions qui vont se concrétiser sur le territoire. L’objectif est une remontée ascendante des solutions car ce n’est pas une institution, ce n’est pas la préfecture, ou encore l’ARS qui apportent les solutions mais bien les gens qui viennent tous les jours et qui subissent les problèmes ».
Pour Ange-Pierre Vivoni : « Je pense que le Président de la République a eu une excellente idée. Je ne sais pas si cela va se concrétiser mais en tout cas j’en formule le vœu pour cette première réunion ici à Calenzana, parce que les territoires ruraux sont abandonnés depuis longtemps. Nous avons vu partir nos écoles, nos Trésoreries, nos Gendarmeries… Maintenant, nous voyons partir les Médecins. Ce problème va devenir celui des deux décennies à venir. Aujourd’hui, le monde rural est vide. Le problème de la santé est beaucoup plus complexe que nous le pensions. Aujourd’hui en Corse, je sais que nos médecins, pour trouver des spécialistes, sont obligés d’envoyer leurs patients sur le continent. C’est quelque chose que nous ne pouvons continuer à faire. Il sera nécessaire d’inverser la tendance. Nous autres, patients, attendons les solutions venant des professionnels de santé. Les politiques peuvent influencer mais ils ont besoin du corps médical pour ouvrir le chemin. Quoiqu’il en soit, il faudra trouver une solution pour affronter les défis de demain. »
Le docteur Dominique Simeoni est ensuite intervenue sur l’offre de soins en Balagne : « Le CPTS regroupe les professionnels de santé et les acteurs médico-sociaux. Nous avons pour mission de porter un projet de santé à l’échelle du territoire. Notre objectif est d’améliorer la couverture médicale pour la population, d’apporter également un soutien et un accompagnement aux professionnels de santé et de faciliter les parcours de santé surtout entre la ville et l’hôpital. En Balagne, autour des deux membres fondateurs du CPTS que sont les maisons de santé de L’Ile-Rousse et de Calenzana, nous avons aussi le centre hospitalier de Calvi et tous les acteurs gravitant autour de la santé et du social. »
La situation en Balagne est plutôt satisfaisante d’autant que de nouveaux médecins généralistes viennent de s’installer à Calvi. : « On est dans un secteur très actif. » souligne Anne-Marie L’Hostis pour l’ARS. Marcel Torracinta, le maire de Santa Reparata considère, de son côté, qu’il faut veiller à prendre en compte toutes les dimensions de la santé, la santé mentale notamment chez les enfants : « Le bien-être sur un territoire, c’est la coordination de tous les acteurs qui, eux, effectivement, parviennent à se coordonner. Dans certaines grandes villes, la carence est peut-être encore plus importante. Dans le sanitaire, il faut bien intégrer la question de la santé mentale, la question de l’inadaptation de l’enfant à l’école. Je reviens sur la question de la coordination, je pense que les maisons de santé représentent le modèle emblématique vers quoi il faut tendre. Une maison de santé doit avoir une articulation directe avec les centres médico-sociaux qui existent et notamment en Balagne. »